13 Avril 2011
DSK est sans aucun doute le seul candidat socialiste potentiel a pouvoir mettre en avant un argument devenu rare sur la place publique française : la stature. La stature c’est très subjectif. C’est une forme d’autorité reconnue ou naturelle et un rapport à la fonction. Je préfère d’ailleurs le mot stature à celui d’homme d’Etat un peu galvaudé. A gauche, ils ne sont pas nombreux à avoir cette « stature ». Il y a ceux qui sont à la retraite, Jospin, Delors, Rocard, Chevènement, Badinter, Joxe… Il y a ceux qui sont en pré-retraite comme Fabius. Et il y a celui qui s’est mis en retrait, Bertrand Delanoë. Or, après 2 présidences Chirac et la catastrophique présidence Sarkozy, présenter un candidat qui soit capable de relever, de réhabiliter et d’incarner la fonction présidentielle me paraît plutôt un atout considérable. C’est aussi sur ces petits détails que s’est jouée la présidentielle de 2007 sauf que peu de français imaginaient alors combien Nicolas Sarkozy serait aussi peu à la hauteur de cette dimension. A cette stature liée à sa fonction actuelle au FMI, s’ajoute également la compréhension du monde. Il est sans doute le seul candidat français à avoir une vision du monde, de l’Europe et de la France dans cet univers. On peut faire des trémolos contre l’horrible mondialisation. On peut aussi proposer la démondialisation. Mais le plus sage me paraît encore de comprendre parfaitement cette mondialisation qui s’impose à nous comme à tous.
Cette stature et cette dimension permet à DSK de pouvoir élargir le spectre du 1er tour et de pouvoir éviter la fuite de voix vers les nombreux futurs candidats du marais centriste. Or l’élection de 2012 se jouera au premier tour. Si Nicolas Sarkozy se retrouve face à un socialiste, il sera en grande difficulté. Si il se retrouve face à Marine Le Pen, sa réélection est assurée. D’où les provocations permanentes pour faire vivre et monter Le Pen. Même si cette stratégie peut déboucher sur un jeu de roulette russe pour lui.
Et pourtant si DSK me paraît au dessus du lot des candidats à la candidature, je suis très circonspect sur sa candidature réelle. Je crois même tout simplement qu’il ne pourra pas être candidat. Il ne pourra pas l’être si il s’entête à aller au plus loin dans sa mission au FMI. Tout le monde peut comprendre qu’il veuille assumer cette mission et en particulier assurer la réussite du G20. Mais Laurent Joffrin a raison : plus tard il entrera dans le jeu et plus il sera difficile pour lui d’assurer son atterissage. Le principal atout jusqu’à maintenant de DSK c’était sa cote dans les sondages. Or, non seulement elle s’effrite, mais de surcroit elle devient relative notamment au regard de la percée de François Hollande, seul candidat à la candidature à avoir créé une vraie dynamique électorale. Or en politique ce n’est pas le statique qui compte, mais bien le dynamique, le mouvement. François Hollande a d'ailleurs réussi à occuper l'espace politique qu'aurait sans doute été celui d'un DSK libre de parler dans l'espace politique français. Cette petite musique qui consiste à respecter les électeurs en ne promettant pas tout et n'importe quoi. Cette petite musique qu'avait choisi de jouer Bertrand Delanoë en 2008 dans la préparation du congrès de Reims quand il parlait "d'efficacité de gauche". Bertrand Delanoë aurait pu continuer à incarner cette dimension et cet espace. Son effacement a laissé le champ libre à François Hollande. Mais surtout, je n’imagine pas un instant Martine Aubry se retirer du jeu. Après avoir réussi l’exploit de joueur de bonneteau d’éliminer et Ségolène Royal et Bertrand Delanoë au congrès de Reims, en étant pourtant 3ème , je ne vois pas très bien par quelle alchimie elle choisirait de laisser sa pole position pour faire place nette à DSK. C’est le scénario rêvé de la branche DSK de la motion D. Le fameux pacte ! Mais qui peut y croire aujourd’hui ? Martine Aubry a réussi la dernière ligne droite en faisant adopter le projet à l’unanimité des cadres. C’est elle qui a maintenant la maitrise de l’agenda. Il lui suffit juste de tirer en premier pour coincer définitivement DSK. Je vois bien la fenêtre du vote des militants socialistes sur le projet pour annoncer qu’elle se sent la candidate du projet. Et il resterait alors à DSK le choix de prendre le risque d’affronter dans la primaire Ségolène Royal, François Hollande et Martine Aubry. Je ne le crois pas prêt à prendre pareil risque – il lui faut de toute façon abréger son mandat au FMI - car le résultat de ce match risque d’être presque aussi aléatoire que le match du congrès de Reims. Et DSK sait ce qu’une primaire veut dire lui qui a terminé la dernière à 20%. DSK doit donc choisir très vite parce que la nature socialiste a horreur du vide et son espace se rétrécit de jour en jour tout comme son avantage relatif.
Dans tous les cas de figure, j’avoue que cette primaire s’engage bien mieux que je ne l’aurais imaginé il y a un an. Nous avons un projet solide avec toutefois quelques excès inutiles qui l'alourdissent. Or nous disposons de 2 candidats potentiels, DSK et François Hollande, capables de lui donner une réelle crédibilité et une forme de légèreté nécessaire.
Enfin, c'est bien parce que cette candidature me parait hypothétique que je ne me prononcerai qu'une fois toutes les candidatures connues et avérées. Se
battre pour des non candidats n'a pas beaucoup de sens.